Les effets spéciaux numériques

Si il est impossible d’obtenir un effet à l’aide de la camera, alors vous devez le créer en post production. À l’instar des grands studios Hollywoodiens, le producteur de film à budget réduit peut aujourd’hui, et ce grâce à la technologie mise à sa disposition, produire des effets visuels intéressants.

L’utilisation des ordinateurs a grandement facilité le travail des concepteurs d’effets visuels. Avec un peu d’imagination, le monteur aura le loisir d’explorer une multitude d’options qui s’offrent désormais à lui. Pour réaliser des effets visuels impressionnants, la planification de ceux-ci doit se faire avec la collaboration du réalisateur au moment du tournage.

Dans un fascicule précédent, nous avons déjà exploré la manipulation du temps. Le ralenti et l’accélération de l’image font partie du concept d’effet visuel. Mais il en existe d’autres. 

Plusieurs techniques, plusieurs résultats

Du plus simple au plus complexe

Le matte painting

Le matte painting est un procédé cinématographique qui consiste à peindre un décor sur une surface plane en y laissant des espaces vides, dans lesquels une ou plusieurs scènes filmées sont incorporées. Les premières applications remontent aux premières décennies du cinéma.

Ce système est très économique car il permet d'étendre à l'infini les arrière-plans sans avoir à construire des décors pharaoniques, c'est-à-dire en trois dimensions ou même à échelle réduite.

Dès les années 1930, il a été largement utilisé dans les films à caractère fantastique et de science-fiction car il permet de laisser libre cours à la créativité et à l'imaginaire. Plus récemment, la saga Star Wars a eu recours à ce procédé.

De nos jours, le matte painting est produit numériquement.

L'une des premières applications remonte à 1907 pour un film de Norman Dawn, Missions of California, aujourd'hui en partie disparu. Par la suite, il convient de citer par exemple les plans dessinés de la séquence de la cité perdue dans King Kong, le plan introductif du palais de Xanadu dans Citizen Kane, les paysages extraterrestres dans Planète interdite, les vues du mont Rushmore qui apparaissent dans La Mort aux trousses, etc.

Traditionnellement, on faisait appel à des artistes peintres qui, travaillant d'après un dessin, utilisaient du pastel ou de la peinture acrylique et l'appliquaient sur du verre pour créer des tableaux de taille variable (de l'ordre de deux mètres carrés), vierges de pigments à certains emplacements. 

Une scène réelle (avec des éléments de décor en harmonie) était tournée à part, de façon à coïncider avec l'espace laissé libre. Il existait trois techniques pour fusionner le tout :

La projection avant : la scène filmée est projetée sur une plaque de verre semi-réfléchissante et l'ensemble est refilmé par une autre caméra.
La rétro-projection : la scène filmée est projetée à l'arrière de la plaque de verre, visible par transparence, et l'ensemble est refilmé par une autre caméra.

L'image latente : la scène est filmée avec un cache. Seul un segment test (environ 60 mètres de film) est développé et projeté sur la plaque où doit être réalisée la peinture. Les artistes voient ainsi exactement les contours du cache et peuvent réaliser leur tableau. Le reste du film n'est pas développé. Quand le matte painting est achevé, on réutilise la même pellicule pour filmer uniquement la peinture. Ainsi le film contient le mixage des deux scènes, directement sur le négatif et sans système de duplication, ce qui améliore sa qualité. C'est un procédé risqué, car la moindre erreur de manipulation endommage le négatif, mais il a été utilisé pour Le Retour du Jedi.

Le niveau de détail des peintures sur verre dépend de la durée de plan : à moins de quatre secondes l'œil ne s'attarde pas sur les détails, à dix cela devient critique. Une scène diurne demande plus de finesse de réalisation qu'un plan de nuit. De même, le centre de la peinture est plus travaillé que les bords, car l'œil s'y pose naturellement en premier. La qualité finale est garantie par un ajustement précis des contours, de l'éclairage, et par le fait qu'on porte son attention sur l'action (qui est réellement filmée), plus que sur le décor. 

Le compositing

Le «Compositing» est un processus de combinaison de plusieurs éléments, comme l’imagerie 3D, des séquences vidéo et de l’imagerie fixe afin de créer un segment final complet. L’utilisation d’un logiciel spécialisé est nécessaire pour obtenir l’effet souhaité.

Le compositing (en français, la « composition ») est un ensemble de méthodes numériques consistant à mélanger plusieurs sources d’images pour en faire un plan unique qui sera intégré dans le montage.

Pour un film d'animation, il s'agit de l'étape finale de fabrication qui consiste à assembler toutes les couches des décors, des personnages et à réaliser les effets de caméra, à animer certains déplacements, et effets spéciaux. En cinéma de prise de vue réel, il consiste surtout à réaliser des effets spéciaux et à truquer des vidéos.

C'est l'un des derniers maillons de la chaîne de l'image dans la réalisation d'un film.

Les sources peuvent être des images numérisées de cinéma, de dessin, de vidéo, des images numériques (dessin, 3D, effets spéciaux).

Le compositing peut être, en fonction des contraintes des sources, fait image par image ou automatisé.

L'un des plus parfaits exemples de compositing est Qui veut la peau de Roger Rabbit ? dans lequel sont mélangés acteurs filmés et dessins animés. 

La rotoscopie

La rotoscopie est une technique cinématographique qui consiste à relever image par image les contours d'une figure filmée en prise de vue réelle pour en transcrire la forme et les actions dans un film d'animation. Ce procédé permet de reproduire, avec réalisme la dynamique des mouvements des sujets filmés.

Les premiers films utilisant cette technique datent de la fin du 19e siècle ou du début du 20e siècle.

Le procédé a été perfectionné et breveté sous le nom de Rotoscope en 1915 par les producteurs et réalisateurs américains Dave et Max Fleischer à l'occasion de la production de leur série Out of the Inkwell.

Leur rotoscope utilisait une table transparente sous laquelle étaient projetées, les unes après les autres, les images du film en prise de vue réelle. Le dessinateur pouvait alors tracer les contours des formes sur des calques.

En infographie, on utilise la rotoscopie avec des logiciels adéquats pour détourer certains éléments image par image d'un film numérisé. Cet objet ou série d'objets peut être par la suite modifié, transformé, dupliqué ou supprimé afin de permettre les volontés du réalisateur.

On appelle 'roto' la ou les courbes utilisées dans les logiciels de traitement de l'image numérique. La roto découpe un objet ou une série d'objets image par image sur un plan. À partir d'une roto complétée, l'artiste génère un matte en noir et blanc qui épouse parfaitement l'objet sur tout le plan.


Le blanc (valeur 1) correspond à la partie visible de l'image qui est totalement opaque ; le noir (valeur 0) correspond à ce qu'on veut exclure. Les valeurs entre 0 et 1 correspondent à une partie visible, possèdent une transparence variable, comme le flou et le blur.  

Le matte généré par une roto est utilisé en composition numérique pour intervenir sur un objet sans affecter le reste de l'image ou alors protéger cet objet d'une intervention globale de l'image filmée.

L'animation 3D

L'animation 3D est une technique d'animation numérique équivalant à l'animation en volume dans un monde virtuel. Les animations 3D sont des œuvres artistiques complexes dont dépend la maîtrise de multiples procédés. L'illusion se façonne autour de la création d'un univers et de personnages à la fois surprenants et d'une réalité presque palpable. Derrière la puissance des ordinateurs et des logiciels, le formidable génie humain a permis d'accéder à un rêve : donner la vie a une matière technologique plutôt abstraite au départ, et à mettre en place des histoires sans limitation pour l'imagination. C'est pourquoi, limiter l'Univers de la 3D à une vision simpliste, serait une erreur.

Modélisation 3D d'un personnage

L'évolution des technologies numériques de l'image a révolutionné les secteurs de divertissement et du spectacle. Animation, jeux vidéo, cinéma, publicité... les images de synthèse 3D envahissent notre quotidien visuel. La production de cinéma d'animation connaît, depuis quelques années, une progression considérable causant ainsi la quasi-disparition de l'animation traditionnelle brisant alors l'hégémonie des Studios Disney dans le domaine du cinéma grand public : les films d'animation se retrouvent sous les feux de la rampe (Toy Story en 1995, Shrek 1 en 2001, Monstres et Cie, L'Âge de glace en 2002, Nemo en 2003...).

Un cerveau modélisé en 3D tournant sur lui-même

L'animation 3D est également utilisée dans le domaine médical. Le résultat d'examens du type scanner ou d'imagerie par résonance magnétique peut être présenté en 3D pour en faciliter la compréhension. Les données brutes servent à calculer des animations 3D. Le médecin peut également réaliser une visite virtuelle de l'organe étudié. Cette utilisation de la 3D est récente, et elle nécessite de fortes puissances de calcul.

Une molécule en 3D tournant sur elle-même

L'enseignement des sciences et des techniques utilise également l'animation 3D pour visualiser des phénomènes difficiles à filmer, par exemple la forme et le mouvement d'atomes ou de molécules, les réactions physiques ou chimiques rapides, le mouvement des astres célestes, etc.

Dans la plupart des cas, les objets et personnages sont construits suivant des modèles à trois dimensions (on définit des volumes avec une texture de surface) et des algorithmes informatiques traitent ces modèles pour générer l'image en simulant une lumière incidente (effet du soleil, d'une lampe...) et en traitant les différents effets (notamment les ombres et réflexions). Les volumes, les paysages, les personnages, tout se construit à partir de polygones. Un bon modeleur 3D peut, à partir d'un simple cube, construire des formes étonnamment complexes. Il travaille ensuite la colorimétrie, et bien entendu l'éclairage ne se fait pas automatiquement, il s'agit de le placer au mieux pour un rendu plausible, ou des effets sur les volumes et l'ambiance générale de la scène.

Le Cel-shading permet, à partir d'une animation 3D, de générer des images ayant l'aspect d'un dessin animé contrairement à l'aspect généralement photoréaliste de la synthèse d'image. Comme la réalisation d'un dessin animé demande la réalisation de nombreux dessins individuels, il peut être plus rapide de créer l'animation en 3D et de laisser l'ordinateur calculer les nombreuses images.

La capture de mouvement consiste à placer des capteurs sur le corps d'un ou plusieurs acteurs, aux articulations par exemple. Chaque capteur envoie ses coordonnées par le biais de caméras infrarouges. Le signal émis est envoyé vers un puissant ordinateur. Lorsque l'acteur joue, les positions des capteurs sont enregistrées en trois dimensions. Ces données peuvent ensuite être insérées dans un logiciel de création d'images de synthèse professionnel.